Pourquoi la standardisation est-elle si « particulière » en hématologie ?

L’efficacité de la prise en charge des patients nécessite des résultats comparables quel que soit lelaboratoire ou le pays dans lequel l’échantillon du patient est prélevé, car les médecins se concentrentsur des fourchettes de paramètres indicatrices d’une pathologie. D’autre part, l’harmonisation et lastandardisation sont fondées sur la traçabilité vers des matériaux de référence certifiés, soit avecdes unités internationales (SI) définies, soit avec toute unité ou méthode de référence arbitraire de l’OMS.

Les meilleurs paramètres standardisés sont exprimés en unités SI, par ex. pour les distances. L’undes plus anciens systèmes de référence est le mètre étalon de Paris. Chacun peut comparer à toutmoment son mètre à cet étalon afin d’assurer l’exactitude des mesures réalisées au fil des ans.

Existe-t-il une unité SI et un matériau de référence en hématologie ?

En hématologie, le sujet des SI est assez complexe. Des paramètres tels que la teneur en eau, ladiffusion de la lumière, la lyse, le rétrécissement ou la forme des cellules sont utilisés pour différencierles cellules telles que les érythrocytes, les leucocytes ou les plaquettes sanguines. La différenciationdes cellules et leur mesure par un analyseur d’hématologie dépend par conséquent d’un grandnombre de paramètres non-SI. Étant donné que ces paramètres ne sont pas mesurés en unités SI,seuls quelques paramètres sont traçables et quelques comparaisons sont possibles. Pour la plupart des paramètres, ces options ne sont pas disponibles.

Le calibrateur et le matériau de contrôle composé de cellules stabilisées mais vivantes constituent lemeilleur matériau de référence actuellement disponible. Un matériau artificiel, composé de billes etde couleurs, ne reflète pas la composition du sang et n’est par conséquent pas disponible. L’absencede cellules dans le calibrateur et le matériau de contrôle ne permettrait pas de tester la fonctionde lyse, par ex. des érythrocytes. De plus, l’absence de leucocytes de granularités différentes nepermettrait pas l’interprétation claire d’un diagramme de dispersion. Le contrôle qualité d’unsystème de mesure correct ne peut être effectué qu’en analysant un matériau de contrôle avecdes cellules sanguines vivantes standardisées. Ce matériau de contrôle étant composé de cellulesvivantes, qui mourront tôt ou tard, ne peut être utilisé comme référence que pour une périoderelativement courte : un mois pour le calibrateur et plusieurs mois pour le matériau de contrôle.Il existe essentiellement deux types de matériaux de contrôle : les matériaux de contrôle dufabricant et les matériaux de contrôle externes.

Matériau de calibration et de contrôles du fabricant

L’utilisation d’un matériau de contrôle qualité fourni par le fabricant permet de garantir la cohérencequotidienne des processus analytiques. Cette procédure garantit la fiabilité des résultats du patientdans la mesure où elle contrôle la fonctionnalité de l’analyseur. La qualité du laboratoire peut égalementêtre contrôlée et documentée par un contrôle qualité. Dans la plupart des pays, l’utilisation decontrôles qualité est imposée par la réglementation ou les recommandations nationales.Le calibrateur et contrôles du fabricant est spécialement conçu pour l’instrument et les réactifsassociés. Les valeurs cibles ne s’appliquent par conséquent qu’à ce paramétrage spécifique etpermettent d’obtenir des résultats fiables uniquement dans cette configuration. Elles ne peuventêtre utilisées avec des instruments d’autres fabricants car chaque analyseur fonctionne de manièredifférente et utilise des quantités différentes de réactifs. Par conséquent, seul le matériau decontrôle du fabricant peut permettre une fonctionnalité complète avec tous les paramètresenregistrés par le système.

Évaluation externe de la qualité (EEQ)

Des contrôles qualité indépendants et externes sont par ailleurs nécessaires pour vérifier l’exactitudedes valeurs au niveau national ou mondial pour le calibrateur et le système de fabrication contrôlé.Ils garantissent également qu’un système composé d’un instrument, d’un réactif, d’un matériau decontrôle du fabricant et d’un calibrateur, ainsi que de l’environnement de l’opérateur et du laboratoire,utilisant le même matériau, produise des valeurs comparables à celles des autres systèmes.Des sociétés telles que ESfEQA ou HuQAS proposent des contrôles hématologiques externes quipeuvent être utilisés sur des analyseurs produits par d’autres fabricants afin de permettre unecomparaison des résultats entre laboratoires, même si les instruments ne sont pas identiques.En général, des échantillons normaux et pathologiques sont fournis. Pour permettre une bonnecomparabilité, ces échantillons doivent être traités de la même manière que ceux issus des patients.Les valeurs cibles spécifiées sont valables pour tous les analyseurs, mais limitées à un certain nombrede paramètres courants et traçables. Pour les systèmes hématologiques, les leucocytes, érythrocytes,l’hémoglobine, l’hématocrite, le volume globulaire moyen et les plaquettes sont généralement disponibles, mais par ex. les paramètres de différenciation des leucocytes ne seront pas accessibles.

L’une des limites réside dans le fait que les échantillons d’évaluation externe de la qualité sont manipulésde manière à prolonger leur durée de conservation et à réduire leur sensibilité aux conditions detransport (variations de température et vibrations). Une comparaison directe avec les résultats dupatient est par conséquent impossible. Il est recommandé aux laboratoires d’utiliser les résultats del’EEQ pour comparer leurs résultats aux résultats consensuels ou de référence (inter)nationaux. Ilsservent également à améliorer leur qualité et à harmoniser leur analyseur d’hématologie avec ungroupe consensuel à l’échelle mondiale.

Essais comparatifs interlaboratoires (« Round Robin tests ») sur du sang frais

Il existe également des fournisseurs d’évaluations externes de la qualité (par ex., INSTAND e.V.) quiproposent des comparaisons interlaboratoires basées sur des échantillons de sang frais.Ces échantillons de sang frais ont l’avantage de couvrir plusieurs paramètres et peuvent être entièrement comparés aux résultats du patient.

Le test interlaboratoires est mené en aveugle. Aucune valeur cible n’est fournie pour le matériel.Les résultats issus d’un système donné sont transférés au fournisseur de l’évaluation. Les donnéesrecueillies sont évaluées et les performances du système comparées à celles des autres instruments de l’EEQ.

Cependant, les conditions de transport et de manipulation des échantillons de sang frais doiventêtre prises en compte. Le matériau de test doit être analysé rapidement (dans les 24h) pour obtenirdes résultats valables. Il est impossible de répéter les mesures en raison de la stabilité limitée deséchantillons. Par conséquent, ce type de contrôle externe de la qualité ne fonctionne qu’au niveaunational et ne peut être mené à l’échelle internationale.

Résumé et conclusion

Il n’existe aucun système de référence fiable en hématologie, sauf pour l’hémoglobine, contrairementà ce qui existe pour les paramètres basés sur les SI. Pour obtenir des résultats d’analyse fiables etprécis, les laboratoires doivent en permanence contrôler et évaluer leurs performances.Ceci n’est possible que par l’utilisation quotidienne d’un matériau de contrôle fourni par le fabricantet par l’utilisation régulière d’un CQ externe. Les matériaux de contrôle doivent être constituésde cellules intactes pour tester les réactions chimiques et la fonction matérielle d’un analyseurd’hématologie. Seuls les matériaux de contrôle du fabricant et le sang frais offrent la possibilité detester tous les paramètres mesurés. En tant que fabricant, nous faisons en sorte que tous leslaboratoires aient accès aux matériaux de contrôle nécessaires à nos analyseurs par l’intermédiaire de nos distributeurs.

L’exécution des deux types de contrôles est une nécessité en hématologie, étant donné qu’il n’existeaucune unité SI pour le système de mesure d’un analyseur d’hématologie.